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Technologies d’Assistance : Un Nouvel Espoir pour les Personnes Handicapées

En Côte d'Ivoire, rares sont les hôpitaux qui ont intégré la problématique du handicap dans leur projet d'établissement. Pour répondre à ce besoin, le pays a mis en place un plan national de développement de la réadaptation et des technologies d'assistance. Ce plan, selon ses initiateurs, faciliterait l'intégration et la participation des personnes handicapées, des personnes âgées, et des personnes atteintes de maladies non transmissibles. Quels sont donc les objectifs de ces technologies d'assistance, quel est l'état des lieux de la réadaptation en Côte d'Ivoire et comment réussir sa mise en place ?

Visite du Centre d’Appareillage Vivre Debout

Beaucoup d’Ivoiriens ignorent que des prestations d’appareillage et d’outillage sont possibles près de chez eux. Pourtant, un personnel qualifié travaille au centre “Vivre Debout” pour rendre la mobilité aux personnes handicapées et améliorer leur vie. Créé en 2000 par des professionnels de la santé en partenariat avec l’Association Handicap International Belgique, ce centre est mis à la disposition du CHU de Yopougon et du CHR de Bouaké. Il est spécialisé dans la fabrication de prothèses de membres inférieurs et supérieurs, d’orthèses, et de grands appareillages orthopédiques sur mesure. Le centre insiste sur un modèle réadaptatif et fonctionnel, offrant aux personnes handicapées un accompagnement de marche associant confort, esthétisme et fonctionnalité.

Mardi 9 avril 2024. Il est 10h15 minutes. L’espace dédié à la rééducation des patients du centre d’appareillage Vivre Debout, situé au centre hospitalier de Yopougon (CHU), est bondé de monde. Certains s’exercent à la marche sans aide avec leur prothèse, d’autres s’appuient sur des barres de fer pour avancer. Parmi ces patients, nous trouvons des personnes amputées d’un ou des deux membres inférieurs, des personnes amputées d’un membre supérieur, et des enfants atteints de handicap intellectuel et visiblement instables.

Ibrahim O., ancien conducteur de car, a été victime d’un accident de la circulation en 2022. Amputé des deux membres inférieurs au niveau de la cuisse, il est très motivé dans la pratique de ses exercices de rééducation. « Je compte rentrer au Burkina avant la fin de l’année. Ce n’est pas facile, mais je suis déterminé à pouvoir marcher seul avec ces prothèses afin d’être véritablement autonome », indique Ibrahim, encouragé par des personnes venues accompagner les patients.

Dame M.Y., en compagnie de son fils en situation de handicap mental, est également présente pour la rééducation de son enfant. Apparemment instable, elle l’aide à s’appuyer sur les barres de fer pour marcher.

Nous observons un directeur proche des patients, tout en sueur. Il aide, motive et encourage certains patients. « Vas-y doucement ! Tu peux y arriver. Si tu te sens fatigué, ne force pas, les choses viendront tout doucement », conseille-t-il.

À la tête de cette structure depuis 2019, Cissé Ali, orthophoniste de formation, est un passionné et fait partie des précurseurs en matière de réadaptation en Côte d’Ivoire. « Depuis 10 ans, j’ai été le responsable technique de Vivre Debout. Chez nous, le handicap physique n’est pas un obstacle à l’épanouissement d’une personne. Au centre d’appareillage Vivre Debout, l’autonomie des personnes handicapées est la base de leur insertion sociale. Plus de 500 000 patients ont été reçus depuis la mise en place de ce centre en 2000 », nous confie-t-il.

Un Atelier qui Conçoit Plusieurs Appareils

Encore très peu de personnes handicapées bénéficient d’aides techniques et de technologies fonctionnelles. Le centre Vivre Debout est donc à la croisée des chemins. Sur ce site, une chaîne complète de spécialistes prend en charge chaque patient pour concevoir, de manière individualisée, des orthèses (pour compenser une fonction de mobilité ou assister une articulation ou un muscle) ou des prothèses (pour remplacer un membre absent). L’atelier conçoit des prothèses de membres supérieurs et inférieurs, des orthèses, des verticalisateurs, des corsets, des corsets-sièges, et des aides techniques de marche telles que les béquilles, les déambulateurs, les cannes anglaises, et les fauteuils roulants. Aux murs, des outils tels que des scies, des tournevis et des pinces sont accrochés. Sur les étagères et dans les armoires, des stocks impressionnants de matières premières comme le plâtre, les métaux et les silicones sont disposés. Que ce soit un simple corset ou une prothèse ultra sophistiquée, ici, tout devient possible : remplacer un pied, une main ou soutenir un membre défaillant. Chaque solution est adaptée selon le degré de handicap et le niveau d’amputation, grâce à la collaboration entre l’équipe et le patient.

“Ici, nous prodiguons un maximum de soins dans un seul et même lieu et fabriquons de nombreuses prothèses par an”, résume Cissé Ali.

Nouveau Bâtiment Adapté de Kinésithérapie

Inauguré en décembre 2022, ce nouveau site bâti sur une superficie de 200 m² est un don du club Rotary d’Abidjan-Cocody, partenaire du centre depuis plus de 10 ans. D’une valeur de 70 millions de Francs CFA, ce site permettra de traiter les patients dans des conditions plus hygiéniques. Le bâtiment, équipé et opérationnel, comprend plusieurs salles, notamment une salle biomécanique, une salle de réentraînement, des salles de massage et des vestiaires. Pour le président exécutif de Vivre Debout, Ali Cissé, cette infrastructure est une bouffée d’oxygène qui vient combler le cadre exigu où les patients étaient précédemment exposés. Elle permettra de prendre en charge davantage de patients en un temps record.

« Notre ambition est de nous installer partout où il y a une structure de santé. Nous voulons nous rapprocher des populations. Lorsqu’on parle d’accessibilité, il faut tenir compte de la proximité des structures par rapport aux bénéficiaires et aux coûts. Nous travaillons avec des spécialistes de santé qui interviennent dans notre domaine, ce qui évite au patient de se déplacer de partout », explique le directeur exécutif de Vivre Debout.

Guy Martial Kouassi 

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Dr Coulibaly Abdouramane, Médecin physique et réadaptateur au CHU de Cocody 

Dr Coulibaly Abdouramane, Médecin physique et réadaptateur au CHU de Cocody :

« Les technologies d’assistance permettent aux personnes de vivre dignement »

Médecin physique et réadaptateur au CHU de Cocody, Dr Coulibaly Abdouramane nous parle de l’importance des technologies d’assistance dans notre système sanitaire…

Les technologies d’assistance sont un sous-groupe des technologies de la santé. Ce sont les produits, les systèmes, les services et toutes activités connexes d’assistance qui ont pour but d’améliorer l’autonomie des personnes et de promouvoir leur bien-être. Il s’agit notamment des lunettes pour ceux qui ont des difficultés de la vision, les fauteuils roulants pour ceux qui ont des difficultés de mobilité et les prothèses pour ceux qui sont dépourvus de membres. Ces technologies d’assistance sont appelées aussi les aides techniques qui sont utilisées par un large éventail de la population notamment les personnes en situation de handicap et même aussi des personnes qui de par leur vie peuvent souffrir de maladies chroniques passagères et aussi des personnes âgées. Il y a donc 3 grands groupes qui sont les personnes handicapées, les personnes âgées et les personnes qui par soit un accident ou une maladie transitoire ont besoin de technologie d’assistance. 

En fait, c’est une thématique qui a été recommandée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) depuis quelques temps et qui demande à ce que les pays prennent les mesures pour que les technologies d’assistance soient inscrites dans le package minimum de santé des pays et même dans les couvertures maladies universelles. En effet, l’OMS s’est rendue compte que mettre à disposition les technologies d’assistance aux différentes populations contribue à réduire les coûts de la santé. On se dit que quelqu’un qui a un problème de mobilité, quand on sait que le plus grand facteur de la santé est l’immobilité. Quand on ne bouge pas beaucoup, on n’est sédentaire, cela facilite la survenue de maladies. Et quand on bouge difficilement sans protection, sans matériel adéquat, cela peut faciliter aussi la survenue d’accident et d’autres éléments. Je prends l’exemple de quelqu’un qui aurait eu une amputation et qui a besoin d’une prothèse. S’il n’y a pas de possibilité de lui trouver une prothèse, il passera plus de temps dans son lit à l’hôpital. Donc, un surcoût non seulement pour la personne mais aussi pour le système de santé. S’il y a un système d’octroi de technologies d’assistance dont une prothèse à cette personne, plus rapidement cette personne pourra sortir de l’hôpital et pourra vaquer à ces occupations et reprendre une activité pour être productive dans la vie. Donc, c’est ce schéma qui permet de montrer l’importance des technologies d’assistance dans la société et surtout sur le coût de la santé. 

Un système qui tourne et gravite autour des technologies d’assistance

Ces technologies d’assistance bénéficieront de tout un système qui tourne et gravite autour d’elles. L’un des premiers éléments de l’écosystème est l’identification des parties prenantes. Le deuxième élément est la politique nationale sur les technologies d’assistance. Ici, il faut faire en sorte que cette politique existe et soit incorporée dans le système sanitaire afin que son impact sur les populations soit palpable. Le troisième élément concerne les produits utilisés par les technologies d’assistance. Il existe 6 domaines de produits. Il s’agit des aides à la mobilité qui concernent le handicap moteur et tous ceux qui ont une restriction pour la mobilité. Nous avons les aides à la vision, tous ceux qui ont un trouble de vision, qui ont besoin d’éléments pour améliorer leur vision. Nous avons aussi les aides à l’audition, tous ceux qui ont besoins d’aide pour pouvoir mieux entendre. Nous avons aussi les aides à la cognition, cela concerne ceux qui ont un trouble de la réflexion, du raisonnement, on parle le plus souvent du handicap intellectuel. Il y a aussi les aides à la communication. Il s’agit de la panoplie des aides qui permettent à la personne de communiquer. Nous avons par exemple le braille qui permet aux personnes aveugles de communiquer, la langue des signes… le dernier élément concerne les aides aux soins corporels et à l’environnement. Ici, nous avons les fauteuils de douches, les chaises de douches, les couches… Le quatrième élément concerne le personnel qui développe et met à disposition ces technologies d’assistance. Il y’a certains qui sont des professionnels de la santé et d’autres des paras de la santé. Quand on prend la vision par exemple, il y’a l’ophtalmologue qui va déterminer l’acuité visuelle, ce qu’il a lieu de faire pour la personne et il y’a l’opticien qui n’est pas un médecin mais qui est un paramédical et qui pourra dire l’appareillage qu’il faut. Il y’a donc tout ce personnel à identifier et à savoir comment créer une synergie et faire en sorte que ce personnel soit disponible dans le pays et si ce n’est pas le cas, organiser la formation initiale des personnes. Il faut également ajouter les prestations de services qui est le cinquième élément. Est-ce que quelqu’un qui est à un point Y de la Côte d’Ivoire peut bénéficier d’un fauteuil roulant au même titre que quelqu’un qui est à un autre point A de la Côte d’Ivoire ? Faire en sorte que les prestations sur tout l’ensemble du territoire national soient possibles. Que ces aides à la mobilité, que ces produits soient disponibles et puissent permettre aux gens de palier aux difficultés qu’ils vont rencontrer dans le courant de leur vie. 

Le dernier élément concerne la personne. Ici, l’OMS souhaiterait que les technologies d’assistance ne soient plus dispensées de manière hasardeuse. Je prends par exemple le cas du fauteuil roulant. Aujourd’hui, lorsque quelqu’un ne peut pas utiliser ces deux jambes, chacun court vers les petits marchés et s’octroie un fauteuil roulant pour le remettre à la personne concernée. C’est très dangereux pour ces personnes qui utilisent ces fauteuils roulants parce que rien ne prouve que ce matériel est adapté à la situation de la personne. Rien ne prouve que ce matériel va lui apporter l’aide nécessaire pour sa situation de handicap qu’il vit. Donc, l’objectif est de faire en sorte que les technologies d’assistance soient administrées ou mises à la disposition des populations sur la base des examens avec des professionnels qui s’y connaissent et qui savent identifier le besoin spécifique de chacun. Voilà un peu l’écosystème des technologies d’assistance. En Côte d’Ivoire, l’évaluation et les recommandations ont été faites relativement à ces technologies. L’évaluation dénommée Evaluation systématique de la situation de la réadaptation en Côte d’Ivoire a été faite en 2020 par un expert désigné par l’OMS. A la suite de cette évaluation, un plan national de développement de la réadaptation et des technologies d’assistance en Côte d’Ivoire a été mis sur pieds. Cela veut dire qu’en Côte d’Ivoire, il y’ a eu une nette évolution et nous attendons les validations du ministère de la santé avant que cette politique puisse se mettre en branle pour essayer de faire de la Côte d’Ivoire un pays qui tient compte des recommandations de l’OMS et qui tient également compte de l’évolution de la situation de la santé au point de vue mondial. En clair, les technologies d’assistance permettent aux personnes de vivre dignement, en bonne santé, d’être productives et indépendantes. L’objectif est de rapprocher les structures d’appareillage auprès des populations. Concrètement, comment les choses se passeront ? Si notre ministère de tutelle a validé les recommandations, l’objectif du plan est de faire en sorte que la réadaptation et les technologies d’assistance soient présentes dans tout le système pyramidal de la Côte d’Ivoire. Au niveau des CHU qui est le plus haut niveau, ensuite au niveau intermédiaire notamment les CHR et les hôpitaux généraux et même au niveau communautaire. Mais chaque niveau n’a pas le même niveau d’importance et le même niveau de prestation de services. Au niveau communautaire, il aura beaucoup plus un rôle de référencement c’est-à-dire qu’ils connaissent les structures capables d’aider un patient et ils savent quels conseils pratiques donner aux patients. Le niveau secondaire, il aura des unités de rééducation et de kinésithérapie et d’appareillage qui pourront par la suite produire un certain nombre d’aide pour ces personnes, mais dans une limite bien déterminée. Au niveau tertiaire c’est-à-dire dans les CHU où c’est le niveau le plus élaboré, qui sera à même de produire tout ce qui est possible pour aider ces personnes dans le cadre de la réadaptation et des technologies d’assistance. Notre souhait est donc de faire en sorte que ce plan national de développement de la réadaptation et des technologies d’assistance puisse prendre forme.

La Côte d’Ivoire a accusé un grand retard

Lorsque nous voyons dans certains pays frères, ce secteur a réussi à avancer malgré les difficultés du pouvoir économique de ces pays. En Côte d’Ivoire, nous sommes restés à la traine dans certains secteurs. Donc, pour booster ce secteur, il faut créer une entité qui aurait la possibilité de vraiment développer ce secteur et permettre de rattraper ce retard en faisant en sorte que la Côte d’Ivoire se retrouve sur l’échiquier national et international avec un système de réadaptation et de technologie d’assistance qui répondent aux normes et aux besoins de la population. Relativement aux ressources humaines, la Côte d’Ivoire a tout. Au niveau des médecins, la Côte d’Ivoire a le cursus de formation des médecins réadaptateurs. Il y’a actuellement 14 médecins réadaptateurs. Le circuit de formation en produit 5 à 10 médecins réadaptateurs chaque année. Donc, à ce niveau, les ressources humaines sont présentes. Quand on prend les Kinésithérapeutes, il y’a l’INFAS qui forme 10 à 15 par an. Et, aujourd’hui, au point de vue unité de kinésithérapie, il y’a une meilleure couverture sur le plan national. La Côte d’Ivoire vient de créer la filière des orthophonistes (rééducation au langage), la première promotion prendra bientôt fonction. Ce qui veut dire que c’est une question de temps pour que la couverture nationale soit comblée. Il y’a certains secteurs qui n’existent pas encore mais je pense qu’avec la volonté des autorités de la santé qui ont pris conscience des données de ce secteur, les choses vont vite se mettre en place. Il s’agit de la filière de l’ergothérapie par exemple. La Côte d’Ivoire est véritablement nantie dans le domaine de la réadaptation. Le gros problème se situe au niveau des infrastructures et de l’organisation des structures d’accompagnement de ce secteur qui est resté un peu à la traine. Comme c’est une recommandation de l’OMS, il y’a énormément de bailleurs de fonds qui sont intéressés dans la mise en œuvre de ce secteur. Ces bailleurs n’attendent que le gouvernement ivoirien mette les structures adéquates en place pour qu’ils puissent apporter leur appui. Et ce, tant au niveau de la formation, tant au niveau de l’équipement et de la construction des infrastructures. Nous souhaitons préciser qu’au-delà du centre d’appareillage Vivre débout, il faut savoir que la plupart des structures émanent du secteur privé. Et, le constat est que la plupart de ces centres est situé dans la zone sud du pays. Nous pensons que notre pays a perçu la justesse du développement de ce secteur pour le bonheur des personnes handicapées. Je disais tantôt que c’est un secteur qui s’adresse à toute la population ivoirienne mais principalement à 3 populations clés de la Côte d’Ivoire. Il s’agit des personnes handicapées, des personnes âgées et des personnes qui dans le courant de la vie auront des difficultés de fonctionnement, de santé, suite à une maladie ou un traumatisme. Et lorsqu’on fait les statistiques, cette population est vraiment énorme, présente et a vraiment des difficultés pour avoir tout ce qu’il faut pour améliorer son fonctionnement. Pour conclure, il faut comprendre que la réadaptation s’occupe du fonctionnement de la personne et le fonctionnement de la personne est le 3ème indicateur de la santé après la mortalité et la morbidité. Cela montre la place de ce secteur dans le système sanitaire d’un pays.

Propos recueillis par Guy Martial Kouassi 

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N’gbra Guillaume Charbel, inspecteur principal option éducation

N’gbra Guillaume Charbel, inspecteur principal option éducation

 « Les aveugles et malvoyants peuvent exercer leurs activités quotidiennes grâce à…… »

N’gbra Guillaume Charbel est inspecteur principal option éducation et formateur en pédagogie spécialisée à l’institut national supérieur de formation sociale (INSFS). Aveugle depuis l’âge de 3 ans, N’gbra Guillaume Charbel estime que l’accessibilité numérique facilite l’intégration scolaire, professionnelle et sociale des personnes handicapées visuelles en Côte d’Ivoire. (Entretien).

Quelles sont les aides technologiques pour personnes aveugles que vous connaissez ?

Les aides technologiques pour personnes aveugles et malvoyantes que je connais se subdivisent en deux catégories. D’abord, Il y a les aides classiques de suppléance visuelle c’est-à-dire, le matériel pour les aveugles conçu avant l’arrivée de l’ordinateur. On distingue dans ce type de matériel, l’ensemble tablette-réglette et feuilles mécanos couramment appelées feuilles brailles qui est l’équivalent du cahier, le poinçon qui est l’équivalent du stylo à bille et du crayon à papier, le boulier compteur ou abacus qui sert à effectuer les opérations avec les nombres entiers ainsi que les nombres décimaux, la machine perkins qui est l’équivalent de la machine à dactylographier, les cannes pour la locomotion des aveugles pour ne citer que ceux-là. Ensuite, il y’a le matériel pour les aveugles basé sur les technologies de l’information (TIC). Nous avons l’embosseuse qui est une imprimante braille, il y a aussi les ordinateurs équipés de revues d’écran ainsi que des assistants virtuels comme job acces with speech (JAWS), voice-over, siri, NVDA… Ces aides technologiques pour les personnes aveugles et malvoyantes couvrent tous les domaines de besoin des aveugles et malvoyants au quotidien (locomotion, travail, cuisine …). 

Quel est l’impact de ces aides techniques sur la vie de cette frange de la population

Les aveugles et malvoyants peuvent faire face à leurs activités de vie quotidienne avec ces aides techniques. Avec le matériel classique de suppléance visuel, les aveugles et malvoyants écrivent, lisent, calculent, se déplacent. Avec le matériel basé sur les technologies de l’information (TIC), les aveugles et malvoyants peuvent faire des impressions en écriture braille, avec les ordinateurs équipés de revues d’écran et d’assistants virtuels, les aveugles peuvent utiliser l’ordinateur et les variantes d’ordinateurs pour notamment, rédiger et lire des documents, envoyer et recevoir des messages électroniques ou encore consulter des sites Web.

Pour qu’elles puissent profiter pleinement de ces possibilités offertes par les nouvelles technologies, encore faut-il qu’un minimum de précautions soient prises par les auteurs des documents, des messages électroniques ou des pages Web.

Comment les personnes déficientes visuelles utilisent l’informatique

En matière d’utilisation de l’informatique, les personnes déficientes visuelles se répartissent en deux catégories. D’une part, les personnes aveugles ou très malvoyantes dont la vision résiduelle ne peut être utilisée pour une lecture soutenue et d’autre part, les personnes malvoyantes pouvant, dans des conditions adaptées, utiliser leur vision résiduelle pour lire. Il est précisé que, en matière de saisie, sauf cas de handicap moteur, toutes les personnes déficientes visuelles peuvent apprendre à se servir d’un clavier ‘’azerty classique’’. Le problème à résoudre est celui de la restitution de ce qui s’affiche à l’écran. Sur l’ordinateur d’une personne aveugle ou malvoyante ne pouvant utiliser sa vision résiduelle, on installe un logiciel appelé « lecteur d’écran » ou « revue d’écran ». Disposant le plus souvent d’un synthétiseur vocal, le lecteur d’écran récupère l’information textuelle et la restitue vocalement à l’utilisateur. Cette vocalisation porte aussi bien sur le texte frappé au clavier que sur le contenu de l’écran (menus, boîtes de dialogue, texte des documents, pages Internet…). Si la personne connaît le braille, le lecteur d’écran peut aussi gérer en parallèle un afficheur braille connecté à l’ordinateur. L’afficheur reconstitue les caractères braille correspondant à une portion de ligne de l’écran, des touches de fonction permettent le déplacement dans l’écran. Il faut aussi ajouter que l’audition ainsi que le toucher ont un fonctionnement très différent de la vue. Quand une personne voyante regarde un écran (ou un document papier), elle a une vue d’ensemble. Elle repère les titres et sous-titres, généralement mis en évidence par des artifices graphiques (caractères plus gros, en gras…) et commence sa lecture à la partie qui l’intéresse. Avec l’audition ou le toucher, il en va autrement. Il n’est pas possible d’avoir une « écoute d’ensemble » ou un « toucher d’ensemble » comme on peut avoir une vue d’ensemble. D’autre part, si la personne déficiente visuelle peut connaître les attributs graphiques (gras, taille) d’une zone de texte, ce n’est pas très facile car cela nécessite une démarche spécifique (et consommatrice de temps) de recherche de ces attributs qui sont perçus spontanément par une personne voyante. En outre, même pour des personnes déficientes visuelles très entraînées, l’écoute d’un texte ou sa lecture en braille sont nettement moins rapides que la lecture visuelle par une personne voyante. Pour que les personnes déficientes visuelles puissent lire des documents informatiques ou des pages Web dans de bonnes conditions de vitesse, il est donc primordial que soient utilisées les possibilités de structuration des documents et pages Web offertes par les logiciels (titres, listes à puces ou numérotées, table des matières…). Les documents ou pages Web ainsi créés comportent des « balises » que peut interpréter le lecteur d’écran et, ainsi, une personne déficiente visuelle peut commencer par ne lire que les titres pour ensuite lire le détail correspondant au titre qui l’intéresse.

Pour les malvoyants disposant de capacités visuelles résiduelles suffisantes, il existe des logiciels d’agrandissement permettant la présentation du contenu de l’écran sous plusieurs formes (plein écran, loupe, ligne, écran partagé…) et la modification très fine des couleurs d’affichage (inversion de polarité, affichage en noir et blanc, suppression ou remplacement de couleurs…). Certains logiciels offrent aussi des aides sonores (lecture des textes affichés, prononciation des saisies faites au clavier). La lecture sera ainsi facilitée par une bonne structuration des documents et pages Web.

Pour que les personnes malvoyantes puissent lire correctement l’information affichée à l’écran, les couleurs doivent être utilisées de manière judicieuse. Il faut donc utiliser des couleurs bien contrastées, en veillant notamment à ce qu’il y ait un contraste suffisant entre la couleur du texte et la couleur d’arrière-plan, il faut éviter l’utilisation de la couleur seule pour donner ou faire ressortir une information. Par exemple, le fait qu’une valeur est négative, cela ne doit pas être indiqué par le seul emploi de la couleur rouge. En clair, un document numérique est donc, en règle générale, plus accessible aux personnes déficientes visuelles qu’un document papier. Si la transformation d’un document numérique accessible en document papier est facile, l’inverse n’est pas vrai.

A travers un plan national de développement de la réadaptation et des technologies d’assistance, la Côte d’Ivoire a maintenant décidé de s’approprier cette question. Quel est donc votre point de vue ?

Je crois que c’est une bonne chose que la Côte d’Ivoire a maintenant décidé de s’approprier cette question. En effet, par cette décision, une solution sera trouvée à la difficulté que les aveugles et malvoyants ont quand ils sont recrutés de façon dérogatoire à la fonction publique. Ils pourront avec ces aides, remédier au problème de la seule écriture braille que les aveugles ont pour travailler alors que leurs employeurs ne lisent pas et n’écrivent pas le braille. L’ordinateur et les variantes d’ordinateur viennent comme des solutions aux limites de l’écriture braille. Il y a aussi que l’accessibilité de l’ordinateur et des variantes d’ordinateur, les aveugles résolvent leur problème de mobilité réduite à travers le télétravail, l’utilisation des applications pour commander des voitures pour se déplacer par exemple.          

Un appel à lancer à la population ?

Je lance un appel à tout le monde. Etat, parents des aveugles, aux aveugles et malvoyants, aux voyants de contribuer dans la mesure de leurs possibilités à l’accès à ces aides techniques qui pourront aider tout le monde. Car, ce qui est accessible à un aveugle est en effet plus accessible à un non aveugle.

Entretien réalisé par Guy Martial Kouassi

 

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Guy Martial Kouassi

Guy Martial Kouassi, Journaliste Web à Ivoirehandicaptv.net depuis 2019. Auparavant, j'ai exercé ce métier tout d'abord sur le site internet www.lebabi.net dans les rubriques Faits divers et High Tech en 2013, ensuite dans le journal papier ''La Synthèse'' au service culture et en ligne www.lasynthèse.net en 2017
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